Le Vison d'Europe

Mustela lutreola (Linné, 1761)
vison : bas latin visio = pet, puanteur (CABARD P. & CHAUVET B., 1998)

carnivores > mustelides

Sa distribution et ses populations

Au siècle dernier, le vison d'Europe était signalé dans la majeure partie de l’Europe à l’exception de la péninsule scandinave et des îles Britanniques et des pays méditerranéens. Depuis, il n’a cessé de régresser. Actuellement, il ne subsiste que des noyaux de populations dispersés qui présentent pour la plupart des effectifs réduits. Le plus important noyau, estimé à 40 000 individus, est situé dans certaines régions de Russie, en Biélorussie, en Ukraine, en Estonie, en Moldavie ainsi qu’en Roumanie. Le noyau occidental, isolé, est localisé dans le sud-ouest de la France et le nord-ouest de l’Espagne (Pays-Bas et Navarre).

En 1997, la présence du vison d’Europe n’est plus attestée que dans 7 départements en France, dans les régions Poitou-Charentes et Aquitaine. L’étude de l’évolution des aires de présence renseigne sur le statut des populations. En France, son aire de présence a régressé de plus de 50% en moins de 20 ans.

Sa Biologie

Description

Le vison d'Europe est un mustélidé de taille modeste, au corps brun foncé, allongé et cylindrique, terminé par une queue représentant le quart de la longueur totale. La tête légèrement aplatie, présente un museau court et large. Les oreilles ne dépassent que faiblement la fourrure. Les membres sont courts. En dehors des organes génitaux, la différenciation entre mâles et femelles est très difficile. La femelle est plus petite et moins lourde que le mâle. La distinction avec le vison d'Amérique est difficile mais ce dernier est nettement plus gros et pèse environ 60 % de plus. Chez le vison d'Europe, la tache blanche du museau s'étend sur la lèvre supérieure, ce qui n'est en général pas le cas chez le vison d'Amérique. Des confusions sont également possibles avec le putois.

 
Poids 0,7 à 1 kg 0,5 à 0,7 kg
Longueur tête et corps 35 à 44 cm 12 à 19 cm
Lougueur de la queue 31 à 40 cm 12 à 18 cm
Longévité 3 ans (8 à 10 ans maxi)

Activité saisonnière et reproduction

La période de rut s’étend de fin février à début avril. La mise-bas a lieu de mars à juin. Avec des potentialités de reproduction moyennes (2 à 7 jeunes par portée, une maturité sexuelle précoce (1 an) et une possibilité de portée de remplacement en cas d'échec de la reproduction ou de perte de jeunes, le vison d’Europe présente une dynamique de population intermédiaire entre celle des mustélidés à démographie rapide telle que la belette et à celle à démographie plus lente comme la martre. Les taux de survie par classe d’âge et de sexe ne sont pas connus.

03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 01 02
Printemps Eté Automne Hiver
rut          
mise-bas      

 

Maturité sexuelle 1 an
Nombre de portée par an 1 (à 2)
Nombre de petits par portée 2 à 7
Durée de la gestation  
Taux de survie juvénile ?
Taux de survie adulte ?
Sex-ratio ?
Structure des populations ?

Activité journalière

Le vison d'Europe est un animal aux mœurs crépusculaires et nocturnes. Il se déplace au sol par bonds avec une démarche rappelant celle du putois et nage bien. Il peut effectuer des déplacements quotidiens de 10 km.

Organisation sociale et spatiale

Il semblerait que le système social repose sur la territorialité intra-sexuelle : mâles et femelles adultes vivent en général en solitaires et le territoire d’un mâle peut couvrir celui d’une ou de plusieurs femelles. La femelle élève seule les jeunes, le sevrage a lieu aux alentours de la 10 ème semaine et les groupes familiaux se défont en août, rarement plus tard. La dispersion des jeunes se fait dans un rayon d’une dizaine de kilomètres.

D’après les quelques études disponibles, la dimension de son domaine vital  est variable, en moyenne de 2,4 km environ de rives en Karélie et de 2 à plus de 13 km de cours d'eau en France (landes de Gascogne).

Régime alimentaire

Le vison d'Europe est un prédateur plutôt généraliste qui se nourrit de tous les types de proies se trouvant dans son biotope. Quatre grands types de proies sont présentes dans son régime alimentaire : les amphibiens (essentiellement les grenouilles), les mammifères (rats et campagnols amphibies), les oiseaux et leurs œufs et enfin les poissons (cyprinidés).

Son habitat

Le vison d'Europe est une espèce strictement inféodée aux zones humides. On le rencontre sur de petites et moyennes rivières le long desquelles il exploite toute la gamme des zones humides. Les plus utilisés en France peuvent être regroupés en cinq catégories : les cours d’eau forestiers, les boisements inondables, les marais, les prairies humides et les ruisseaux traversant les zones agricoles. Il utilise les terriers creusés dans les berges et entre les racines d'arbres mais peut également gîter en plein air ou dans les arbres creux.

Les menaces

Le vison d'Europe est actuellement le carnivore européen le plus menacé, après le lynx pardelle. La disparition progressive de l’espèce est liée à la conjonction de plusieurs facteurs négatifs. Quatre causes principales sont généralement évoquées :
- la destruction des habitats de prédilection, notamment la disparition ou la dégradation des zones humides (assèchement, mise en culture, pollutions, artificialisation de la végétation) ;
- les destructions directes. Au cours du XXe siècle, le piégeage pour la fourrure a probablement joué un rôle majeur dans la régression de ses populations. Malgré son statut d’espèce protégée, les campagnes massives de destruction du vison d'Amérique, organisées depuis les années 60-70, ont probablement induit des destructions accidentelles, par confusion. Les campagnes d’empoisonnement des rongeurs exogènes (ragondins, rats musqués) à l’aide d’anticoagulants conduisent à des intoxications secondaires par consommation d’individus empoisonnés. Les collisions routières sont actuellement une cause de mortalité non négligeable ;
- la compétition avec le vison d’Amérique, qui occupe la même niche écologique que le vison d’Europe ;
- l’action d’agents pathogènes comme par exemple celui de la maladie aléoutienne, qui aurait été introduit par le vison d’Amérique.

L'espèce fait l’objet depuis 1999 d’un programme national de restauration mis en place par l’Etat pour :

1) protéger et restaurer ses habitats,

2) développer la recherche en matière d'exigences écologiques et de causes de régression,

3) combattre les causes indirectes de mortalité et les facteurs de déclin pressentis (contrôle du vison d'Amérique, aménagements routiers) et

4) sensibiliser le public et les piégeurs.

Ses indices de presence

Le crâne

Le crâne du vison d’Europe se caractérise par un aplatissement dorso-ventral nettement visible en vue latérale. Le profil présente une légère concavité dans la partie médiane et l’angle facial est faible. Le rostre est particulièrement court et large. Les orbites sont largement ouvertes postérieurement et la distance interorbitaire est faible. La crête sagittale est assez peu développée et seulement plus ou moins bien marquée dans la partie postérieure. La crête occipitale est bien développée. Les bulles tympaniques sont étroites allongées et en forme d’amande, la pointe située vers l’arrière. Par rapport à sa longueur, la mandibule paraît relativement haute dans sa branche horizontale. Le crâne du mâle est différent de la femelle : le profil est plus anguleux et la crête sagittale est plus développée.

Les empreintes et voies

Elle ressemble en tout point à celles du vison d’Amérique et du putois. Les empreintes mesurent 3 à4 cm de long pour 3 à 4,5 cm de large. Le vison d’Amérique a les cinq doigts de chaque patte reliés par une palmure, ce qui témoigne de son adaptation au milieu aquatique. L’empreinte complète du pied montre donc 5 doigts, les griffes et la palmure si elle s’est posée dans la vase molle, par exemple.

Les fécès

Les laissées sont identiques pour le vison d’Europe et le vison d’Amérique. Elles mesurent 6 à 8 cm de long pour 5 à 8 mm de diamètre, elles sont difficiles à distinguer du putois. Les excréments sont généralement déposés sur des sites où ils sont bien en évidence. Ils contiennent souvent des restes de poissons et possèdent une odeur caractéristique qui permet de les distinguer de ceux de la Loutre. Ils sont souvent cylindriques et d’aspects « cordé ».

Son statut juridique

C'est un mammifère protégé qui figure sur la liste de l'arrêté ministériel du 23 avril 2007Télécharger l'arrêté. Aupparaant, le vison d'Europe était inscrit à l’article 1 de l’arrêté ministériel du 17 avril 1981 : la destruction, l'altération ou la dégradation de son milieu, ainsi que la destruction, la mutilation, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'individus ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat sont interdits.

Elle est inscrite à l’annexe II de la convention de Berne : toutes les formes de capture, de détention ou de mise à mort intentionnelles, la détérioration ou la destruction intentionnelles des sites de reproduction ou des aires de repos, la perturbation intentionnelle de la faune sauvage, notamment durant la période de reproduction, de dépendance et d'hibernation, la détention et le commerce interne de ces animaux, vivants ou morts, y compris des animaux naturalisés ou de toute partie ou de tout produit, obtenus à partir de l'animal sont prohibés.

Le Vison d'Europe figure également aux annexes II et IV de la directive Habitat-Faune-Flore : espèce animale d’intérêt communautaire dont la conservation néc essite la désignation de zones spéciales de conservation (ZSC) et espèce devant être strictement protégée.

Carte de repartition du Vison d'Europe en france

Un peu de bibliographie...

BOUCHARDY C. & MOUTOU F., 1989. Observer les mammifères sauvages. Edition Bordas. 239p.

CABARD P. & CHAUVET B., 1998. Etymologie des noms de mammifères. Eveil Nature. 239p.

CAMBY A. & BOUCHARDY C., 1986. Le vison d’europe. Office national de la chasse, Fiche Technique n°37. 4p.

CAMBY A. & MAIZERET C., 1990. Le vison d'Europe (Mustela lutreola L., 1761) et le vison d'Amérique (Mustela vison Schreber, 1777). Société Française d’Etude et de Protection des Mammifères (SFEPM). Encyclopédie des carnivores de France, n° 13 et 14. 44p.

LE GARFF B. & CONSTANT P., 1990. Connaître et reconnaître les traces d’animaux. Edition Ouest-France. 110p.

Mission Vison d’Europe 2003. Bilan du premier plan national de restauration du Vison d’Europe. DIREN Aquitaine. Rapport d’ étude. 108p.

RUETTE S., 2002. Les Petits carnivores, élément de biologie, gestion de l’espèce et de ses habitats. ONCFS. 24p.

© Virginie CROQUET 2008